Le Made in Morocco séduit-il vraiment les Marocains ?
Entre le geste patriotique de consommer marocain et les freins de perception négative, le consommateur national se voit partagé. Le constat est encore plus sérieux chez les jeunes. Comment faire sauter les verrous ?

L’ensemble des acteurs économiques le disent : Consommer marocain est devenu un impératif pour l’avenir économique du pays. Certains le définissent même comme un acte de patriotisme. Mais, les Marocains consomment-ils les produits marocains ? Sont-ils prêts à le faire ? Sinon, quels sont les facteurs de blocage ?
Des questions auxquelles le président de Ouadie Madih président de la Fédération nationale des associations du consommateur (FNAC) tente de répondre, en attendant la publication des résultats de l’étude lancée il y a quelques semaines par la fédération, qui permettront de mieux cerner les attentes des marocains par rapport au Made in Morocco et déceler les obstacles à lever.
Pour lui, le consommateur marocain est sollicité aujourd’hui pour devenir un acteur de la relance économique du pays. Consommer local, c’est un soutien au tissu économique marocain, et donc aux emplois. Il va encore plus loin en soulignant que c’est un devoir, en tant que consommateurs, de faire preuve de solidarité et d’aider au développement économique national, encore faut-il proposer un produit de qualité et répondre aux exigences réglementaires tout en respectant le consommateur et ses droits. Sur la qualité des produits, certains groupes comme Marjane sont très exigeants. La preuve : «le principal critère pour le choix de nos partenaires industriels est que le produit réponde à nos exigences de grande qualité comme définies dans nos cahiers de charges et qu’il apporte une réponse plus compétitive en terme de prix pour le consommateur Marocain », explique Abderrahim Janati DGA Marjane Holding en charge de l’offre commerciale
Madih insiste aussi sur le fait que le consommateur doit être impliqué dans la mise en place des stratégies de promotion de la consommation du produit local. Il appelle donc les industriels à réinstaurer la confiance vis-à-vis des consommateurs en adoptant les bonnes démarches pour les reconquérir. «Nous avons été sollicités par le ministère de l’Industrie afin de faire part de nos attentes et notre perception envers tout ce qui est produit localement. C’est un bon signe », confie Madih en affirmant que le consommateur devient aujourd’hui un consomm’acteur.
De son côté Lamnini, président APMM évoque la problématique liée à la perception. Une étude menée en mars 2021 par le cabinet Imperium le prouve. Il en ressort que les Marocains sont résolument convaincus de l’importance de « consommer marocain ». En témoignent les chiffres avancés : 5 Marocains sur 10 de la population interrogée déclarent faire attention au label « Made In Morocco » lors de leurs achats des produits habituels, et 2 à 3 Marocains sur 10 le font « plus » à « beaucoup plus ». Néanmoins, l’attention des consommateurs marocains, au moins ceux interrogés par l’étude, demeure plus concentrée sur d’autres critères tels que la qualité (70%), le prix (57%), l’emballage (36%) et le nom de la marque (32%). Ces critères dépassent de loin celui de l’origine du produit (14%), relève Imperium. L’étude s’est penchée également sur la question de la confiance. Il en ressort que 72% des personnes sondées se sont déclarées confiantes vis-à-vis des produits fabriqués au Maroc, dont 28% se disent très confiantes, notamment des personnes de la classe moyenne âgées de 35 ans et plus. Par contre, les jeunes semblent plus réticents que leurs aînés, sachant que 44% des gens sondés, qui sont peu confiants, sont précisément les Marocains de moins de 24 ans.
La question de confiance demeure alors inquiétante. Pour Lamnini, la perception négative vis-à-vis des marques marocaines s’explique par la défaillance en matière de communication. En effet, affirme-t-il, les TPE et PME n’ont pas les moyens pour communiquer comme il se doit contrairement aux marques étrangères qui grâce à la communication ont pu construire une image associée à la qualité et ancrer dans les mentalités que les produits en provenance de l’étranger sont les meilleurs. Abderrahim Janati, lui, a un autre avis. Pour lui, malgré que Marjane n’ait pas encore communiqué sur les produits made in morocco que le groupe propose, les résultats de la stratégie de sourcing local dépassent les prévisions. Il conclut ainsi «que les produits marocains sont appréciés même si le client ne connait pas leurs origines ».