Vers une révision en profondeur du prix des médicaments au Maroc

Le ministère de la Santé marocain se prépare à redessiner les règles du jeu pour le tarif des médicaments, face à une envolée des dépenses qui pèse lourd sur les caisses publiques et les assurances maladie. Inspirée d’analyses de Finances News, cette refonte entend à la fois faciliter l’accès aux traitements et préserver l’équilibre financier du secteur.

Selon Abdelmadjid Belaïche, consultant en économie pharmaceutique, le nouveau cadre s’articule autour de trois axes majeurs. D’abord, seules les spécialités remboursables ou susceptibles de l’être verront leur Prix Public de Vente (PPV) affiché, afin de concentrer la régulation sur les médicaments les plus stratégiques. Ensuite, une réévaluation ciblée des PPV s’appliquera tant aux princeps qu’aux génériques, pour garantir une juste compétition tarifaire. Enfin, pour les molécules les plus coûteuses — qui représentent plus de la moitié des remboursements tout en ne comptant qu’une centaine d’intitulés —, un double prix sera institué : un tarif facial public et un tarif remisé, confidentiel, négocié directement avec les laboratoires.

Ce dispositif de prix remisés, pratiqué ailleurs en Europe, permettrait d’obtenir des remises substantielles sans que ces rabais ne servent de référence pour d’autres marchés, limitant ainsi les demandes de baisse en cascade. En parallèle, le texte prévoit un recours systématique aux licences obligatoires si les négociations échouent, ouvrant la porte à la production locale ou à l’importation de génériques à coûts réduits.

Autre avancée notable : la généralisation du droit de substitution dans les officines. Les pharmaciens pourront proposer systématiquement un générique ou un biosimilaire équivalent, ce qui devrait se traduire par des économies significatives pour les patients et l’assurance maladie.

La réforme entend aussi accélérer drastiquement les procédures : l’autorisation de mise sur le marché (AMM) et la demande de remboursement seront traitées simultanément, rompant avec le schéma séquentiel actuel qui multiplie les délais. Les comités d’évaluation du service médical rendu et de l’impact économique, aujourd’hui rassemblés seulement une fois par mois, verront leur fréquence renforcée pour éviter tout engorgement.

Malgré ces innovations, les syndicats de pharmaciens expriment leur inquiétude, dénonçant un manque de concertation. Si le ministère reconnaît pour la première fois les difficultés financières rencontrées par les officines, leur participation active au processus aurait, selon eux, permis d’ajuster certaines mesures.

Quoi qu’il en soit, cette réforme marque un tournant : en ciblant directement les médicaments les plus budgétivores, en encourageant les génériques et en fluidifiant les démarches administratives, le Maroc pose les jalons d’un modèle de tarification à la fois plus transparent et économiquement viable. Reste maintenant à transformer ces intentions en réalités concrètes pour garantir l’accès aux soins à tous les citoyens sans compromettre la santé financière du système.

Avec Finances News

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