Dans le projet de loi de finances 2026, le gouvernement prévoit d’instaurer une surtaxe de 2 % sur les transactions immobilières et les cessions de fonds de commerce réalisées sans trace bancaire. Une mesure à la fois fiscale et symbolique, visant à freiner l’usage du cash et à encourager la bancarisation d’une économie encore largement liquide.
Changer une habitude profondément enracinée dans la culture économique marocaine n’est jamais simple. Pourtant, le gouvernement semble déterminé : payer en espèces pourrait bientôt coûter plus cher. Concrètement, le droit d’enregistrement sur ces opérations — actuellement de 4 à 6 % selon la nature du bien — sera majoré de deux points si la transaction n’est pas documentée par un justificatif bancaire.
L’objectif est clair : renforcer la traçabilité et la transparence. L’immobilier et les fonds de commerce, souvent soumis à des paiements en liquide et à des déclarations partielles, sont particulièrement vulnérables à la fraude et à l’évasion fiscale. En imposant un surcoût aux transactions non bancarisées, l’État cherche à pousser les acteurs vers le circuit officiel.
Selon Bank Al-Maghrib, la masse de liquidités en circulation atteignait 458 milliards de dirhams à fin juillet 2025, alimentant à la fois la consommation et des zones grises où prospèrent fraude fiscale et corruption. Dans ce contexte, la mesure frappe directement là où cela peut faire effet : dans le porte-monnaie des contrevenants.
Les notaires joueront un rôle central : ils devront mentionner le mode de paiement et joindre un justificatif bancaire à chaque acte. À défaut, la surtaxe s’appliquera automatiquement. Cette pression fiscale vise aussi l’écosystème autour des transactions — intermédiaires, agents immobiliers et autres professionnels — pour limiter la tentation du cash facile.
Il est important de souligner que la surtaxe de 2 % ne constitue pas une amnistie : les infractions éventuelles restent passibles de contrôle et de redressement selon le Code général des impôts. L’objectif affiché dépasse donc le simple enjeu budgétaire : il s’agit d’instaurer une nouvelle discipline économique, où les paiements traçables deviennent la norme.
La question reste ouverte : cette mesure suffira-t-elle à transformer un réflexe historique, profondément ancré dans le quotidien des Marocains ? L’État mise sur l’effet dissuasif de la surtaxe pour amorcer une transition vers une économie plus bancarisée, transparente et moderne.
Avec L’Économiste

