Le gouvernement marocain se retrouve sous le feu des critiques après l’échec apparent de sa politique d’importation de viande rouge. Malgré une enveloppe colossale de 13 milliards de dirhams investie dans l’importation de bovins, d’ovins et de viandes rouges, les prix restent toujours aussi élevés, sans le moindre impact sur le pouvoir d’achat des citoyens. Une situation qui met le ministre de l’Agriculture, Ahmed El Bouari, en difficulté, alors qu’il est convoqué au Parlement pour s’expliquer sur cette gestion controversée.
Un pari à 13 milliards de dirhams… pour rien ?
Face à une flambée des prix de la viande rouge, le gouvernement avait misé sur l’importation pour soulager le marché. Mais aujourd’hui, force est de constater que la stratégie a échoué. Le prix du kilogramme d’agneau a atteint 140 dirhams, et les perspectives ne sont guère rassurantes à l’approche du Ramadan et de l’Aïd Al-Adha.
L’opposition, qui a interpellé le ministre au Parlement, s’interroge sur l’efficacité de ces importations et sur l’octroi d’avantages fiscaux qui, selon certains députés, auraient davantage profité aux intermédiaires qu’aux éleveurs. Les « chennaka », ces revendeurs opportunistes, auraient tiré leur épingle du jeu, tandis que les véritables éleveurs, les « kessaba », peinent toujours à maintenir leur activité.
Des abattoirs vétustes, une logistique inadaptée
Autre élément qui alimente la polémique : la gestion de l’importation des viandes congelées. Le gouvernement avait autorisé cette pratique pour une durée limitée de trois mois, avant de l’arrêter brutalement en raison de problèmes techniques et juridiques. En cause ? Un manque criant d’infrastructures adaptées.
Le Maroc ne compte que 15 abattoirs agréés par l’ONSSA, dont seulement 7 sont privés, alors que le pays en recense plus de 800 au total. De nombreux établissements publics souffrent d’un déficit en équipements de réfrigération et en normes sanitaires. Résultat : la conservation des viandes importées s’est révélée être un véritable casse-tête, obligeant les professionnels à recourir à des structures privées, ce qui a alourdi les coûts et annihilé l’effet escompté sur les prix.
Vers une remise en question des importations ?
Avec la pression montante du Parlement et de l’opinion publique, la question de la pertinence de l’importation massive de viande rouge se pose avec acuité. Loin d’avoir permis une baisse des prix, cette politique a surtout mis en lumière les dysfonctionnements du secteur : un cheptel en difficulté, une filière mal structurée et une gestion des subventions qui favorise davantage la spéculation que le consommateur.
Alors que le Ramadan approche et que les craintes d’une flambée des prix s’accentuent, le gouvernement devra trouver des solutions rapides et efficaces. Une refonte du secteur s’impose, mais la vraie question reste : ces milliards perdus auraient-ils pu être mieux investis dans le soutien à la production locale et la modernisation des infrastructures ?