Fécondité en chute, vieillissement accéléré et urbanisation : le HCP dresse un tableau préoccupant de la démographie marocaine

Le Maroc vit une mutation démographique sans précédent. Avec 36,8 millions d’habitants en 2024, dont près des deux tiers en ville, et une projection à 40,5 millions en 2040, le pays fait face à un double défi : le recul de la natalité et l’accélération du vieillissement, le tout sur fond d’urbanisation massive.

Selon les données issues du recensement 2024 et publiées par le Haut-Commissariat au plan (HCP), le taux de fécondité est tombé à 1,97 enfant par femme, contre 7,2 en 1960. Résultat : la population des moins de 15 ans devrait passer de 9,76 millions aujourd’hui à 7,8 millions en 2040. En revanche, les plus de 60 ans bondiraient de 5 à 7,9 millions, soit près de 20% de la population. Cette bascule fragilise les régimes de retraite et les systèmes de santé, tout en mettant la solidarité intergénérationnelle à rude épreuve.

Une fenêtre démographique à exploiter

Le HCP insiste sur l’opportunité à saisir : entre 2024 et 2040, les Marocains en âge de travailler (15-59 ans) passeront de 22,1 à 24,8 millions. Cette « aubaine démographique », qui devrait se refermer vers 2038, ne portera ses fruits que si le pays investit massivement dans l’éducation, l’emploi et la formation, afin d’améliorer l’employabilité et de stimuler la croissance.

Une urbanisation galopante

Autre tendance majeure : l’urbanisation. En 2040, près de 28 millions de Marocains vivront en ville, soit 69% de la population. Une pression qui appelle à une planification territoriale ambitieuse. Le HCP estime qu’il faudra construire trois millions de logements supplémentaires d’ici là, tout en résorbant l’habitat insalubre et en réduisant les disparités entre villes et campagnes.

Cette transformation s’accompagne d’une mutation des ménages : leur nombre augmentera de 32% pour atteindre 12,3 millions en 2040, tandis que leur taille moyenne continuera de se réduire, passant de 3,9 à 3,3 personnes.

Migration et recomposition sociale

Le Maroc compte aujourd’hui plus de cinq millions de ressortissants à l’étranger et 148.000 étrangers installés sur son sol, une population en forte hausse depuis 2014, majoritairement issue d’Afrique subsaharienne. Cette double dynamique – émigration et immigration – conforte le rôle du pays comme carrefour migratoire. Le HCP recommande une stratégie nationale d’intégration qui valorise les compétences des migrants et accompagne les retours.

Anticiper pour transformer

Ces évolutions rapides traduisent une recomposition sociale et territoriale profonde. Pour le HCP, elles ne doivent pas être perçues comme une menace mais comme un levier stratégique, à condition de les anticiper. « Les résultats du recensement imposent d’intégrer la variable démographique dans tous les choix de développement », souligne l’institution, reprenant l’appel de Mohammed VI à adapter les politiques publiques aux transformations en cours.

Santé, éducation, logement, emploi, protection sociale et aménagement du territoire : la transition démographique place l’État devant l’urgence d’une vision intégrée capable de transformer ces bouleversements en opportunités durables.

Quitter la version mobile