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CLASSES MOYENNES
contribue à éroder le pouvoir d’achat des ménages
vu la charge budgétaire supportée, en particulier SANTÉ : PAS ASSEZ PAUVRE POUR
pour les classes défavorisées et la classe moyenne LE RAMED…
(double taxation) et de ce fait augmente leur insa-
tisfaction devant l’inexistence d’un service public D’après le rapport du CESE, la dégradation de la
de qualité en contrepartie de l’impôt payé », qualité des soins a conduit à une fuite vers le secteur
déplore le CESE. privé des patients les plus solvables. Et si la classe
«L’Etat n’a pas délaissé les services publics. C’est moyenne fuit aujourd’hui au secteur privé, c’est au
plutôt la faiblesse des moyens qui a poussé à cet détriment de son revenu. Puisque notons, le, les frais
état de fait. Nous sommes une petite économie au niveau du privé ne cessent d’augmenter +11,5%
qui produit durablement un taux de croissance pour les services médicaux et +4,8% pour les services
bas. Et nous ne pouvons pas faire plus, actuelle- hospitaliers entre 2013 et 2017, comme le note le HCP.
ment, dans ces secteurs », nuance Kamal Mesbahi En même temps, cette classe n’est pas aussi défavori-
, professeur universitaire. sée et donc ne pourrait satisfaire aux critères de la
Une position radicalement inconciliable avec celle détention d’une carte RAMED. Finalement elle se
du fiscaliste Oubouali qui considère qu’ « un ser- retrouve entre l’étau et l’enclume : elle veut absolu-
vice public gratuit et de qualité est un droit et non ment éviter de se faire soigner dans le public, à cause
une faveur ». de la qualité des prestations, et n’arrive pas à faire
face au service coûteux du privé d’autant plus que la
COMMENT S’EN SORTIR ? majorité des personnes issues de cette classe
Pour Kamal Mesbahi, consolider la classe moyenne ne bénéficient d’aucune couverture
moyenne, c’est réinventer notre trajectoire éco- médicale. Et même si certains ont une assurance
nomique et adopter une nouvelle qui produit de maladie obligatoire (AMO), elle ne permet pas de
la richesse et de l’emploi. Aussi, il préconise, de couvrir tous les frais ni toutes les prestations. La crise
mettre en place les réformes nécessaires notam- sanitaire a révélé la faille.
ment, celles relatives au système des retraites et En réponse à cette carence, dans son dernier discours
à la mise à niveau de l’Administration. de la Fête du Trône, le Roi Mohammed VI d a annoncé
Le CESE considère, de son côté, que pour relever le lancement du chantier royal de la généralisation
le défi du maintien et du renforcement de la classe de la couverture sociale au profit de tous les Maro-
moyenne, il est nécessaire de mettre en place une cains dans un délai de cinq ans.
politique ciblée, fondée principalement sur le
développement et l’amélioration de la qualité des
services sociaux de base. l’Etat, engendrant ainsi des revendications salariales
Le Conseil de Chami est catégorique : «Un soutien moindres ou moins fréquentes ».
du pouvoir d’achat ne passe pas nécessairement Cette politique devrait en effet se concentrer sur le
par la hausse des salaires puisque l’Etat doit agir soutien à l’entrepreneuriat au profit de la classe moyenne,
plutôt sur le revenu disponible en pourvoyant des tout en encourageant le climat des affaires, en plus
services publics et biens collectifs accessibles à d’équilibrer les charges fiscales en fonction du niveau
tous et de qualité suffisante (éducation, santé, de vie, et de faire des centres ruraux des pôles de déve-
transport, aide au logement…). L’accès à ces ser- loppement économique, afin de lutter contre la migra-
vices publics permettra d’entretenir le pouvoir tion et d’encourager l’émergence de la classe moyenne
d’achat des travailleurs sans pénaliser la compé- rurale.
titivité-coût de l’entreprise, étant donné que la
charge de ces dépenses sociales sera assumée par
N°19 - OCTOBRE 2020- 4 ANNÉE 23
ÈME