Le Grand Cirque : le Film évènement de Booder et Gaëlle Falzerana en salle
Au cinéma le 15 février

De passage à l’hôpital, Momo, comédien et humoriste raté, rencontre Michel, président d’une association de clowns bénévoles. Michel lui propose d’enfiler le nez rouge. Momo accepte alors l’impossible : faire rire les enfants malgré la maladie.
ENTRETIEN AVEC BOODER RÉALISATEUR ET ACTEUR
COMMENT EST NÉ CE PROJET ? A-T-IL DES RÉSONANCES AUTOBIOGRAPHIQUES ?
Je suis né dans un petit village marocain le 13 août 1978, en plein été, et quand je suis arrivé au monde, le médecin a dit à ma mère « il ne passera pas l’hiver » ! En effet, je souffrais d’une complication respiratoire, d’un asthme prononcé et d’une bronchiolite aiguë. J’ai donc eu un début de vie assez tragique, mais mon père, qui travaillait en France à ce moment-là, ne s’est pas résigné : il s’est débrouillé pour nous faire venir à Paris et j’ai ainsi passé mes trois premières années à l’hôpital Necker pour enfants malades. C’est à cette occasion que j’ai découvert le métier de clown dans les hôpitaux. Trente ans plus tard, quand je suis devenu comédien et que
j’ai commencé à rendre visite à mon tour aux enfants malades dans les hôpitaux, j’ai redécouvert ces clowns et j’ai eu envie d’écrire un film pour leur rendre hommage et parler de leur patience et de leur dévouement infinis.
POUVEZ-VOUS NOUS PARLER DE VOS PROPRES VISITES D’ENFANTS À L’HÔPITAL ?
J’allais les voir pour les sortir de leur quotidien, et un médecin m’a dit un jour que ces visites avaient des conséquences positives sur leurs examens sanguins – qu’il y avait un avant et un après. Quand, dans le film, Michel explique à Momo que les enfants n’aspirent qu’à une seule chose – la vie –, c’est une phrase que j’ai entendue. De même, quand un petit garçon me confie que la seule chose qui lui fait peur, c’est de laisser ses parents seuls, je l’ai entendu dans la bouche d’un enfant. Je voulais retrouver ces phrases dans le film pour ne pas les oublier et pour dire à tous ceux qui iront voir ce film que cela fait partie du vivre-ensemble – et que c’est important de prendre sur son temps pour aller réconforter les familles.
VOUS AVEZ ÉCRIT LE SCÉNARIO AVEC GAËLLE FALZERANA ET JEAN-RACHID. C’ÉTAIT IMPORTANT D’ÉCRIRE À PLUSIEURS MAINS ?
Au départ, j’avais écrit des scènes éparses que j’avais moi-même vécues, mais il me fallait une professionnelle de l’écriture scénaristique. J’ai rencontré Gaëlle qui a été touchée par cette histoire et grâce au Covid, on a eu le temps d’échanger des idées et de confronter nos points de vue, et elle m’a apporté la force scénaristique de l’histoire qui me manquait. Ensuite, il m’a paru logique et naturel qu’elle soit coréalisatrice à mes côtés.
COMMENT SE SONT ESQUISSÉS LES PERSONNAGES DES ENFANTS ?
Ils s’inspirent tous des quelques milliers d’enfants que j’ai croisés quand j’allais dans les associations et les hôpitaux. Le plus souvent, quand je rencontrais les enfants, je ne leur demandais pas quelle était leur maladie, mais ils se livraient spontanément car ils se voient avant tout comme des enfants – pas comme des enfants malades. J’ai donc attribué à mes jeunes personnages au moins deux ou trois dialogues que j’avais entendus auparavant chez des enfants.
CERTAINS CLOWNS DE CINÉMA VOUS ONT-ILS INSPIRÉ ?
Le personnage de clown est totalement magique car dès lors qu’on enfile le nez rouge, il se passe quelque chose. Au moment des essais, c’était la première fois que je mettais le nez rouge et je me suis aussitôt senti habité par un personnage burlesque, cartoonesque. J’avais beaucoup d’exemples et de références en tête grâce aux clowns que je voyais quand j’étais enfant à l’hôpital.
Pour l’écriture, j’étais en contact avec un clown assez âgé que j’ai côtoyé pendant trois jours à l’hôpital Robert-Debré : j’ai compris comment il fonctionnait et j’ai vu son innocence dans son regard et sa manière d’être.
LA RENCONTRE AVEC MICHEL EST UN TOURNANT DANS LA VIE DE MOMO. PEUT-ON Y VOIR
UN PARCOURS INITIATIQUE POUR VOTRE PERSONNAGE ?
Le film raconte l’histoire du destin ! Michel se trouve sur le parcours de Momo, comme si c’était
prédestiné, écrit d’avance. Pour Momo, qui est dans une phase difficile sur le plan de la santé,
Michel est la seule petite lumière blanche au bout du couloir. Cette rencontre chamboule sa vie :
Michel le met au défi, et Momo s’aperçoit que le seul endroit au monde où il fait rire, c’est à l’hôpital
et qu’il y a sa place. C’est une rencontre déterminante qui aurait très bien pu ne pas avoir lieu si
Momo ne s’était pas trompé d’ascenseur…
MICHEL EST UN HOMME GÉNÉREUX, MAIS IL NE MÉNAGE PAS MOMO.
J’ai l’impression que Michel se voit à travers Momo : il se retrouve en lui quand il était jeune. Il
joue un peu le rôle de son coach : pour gagner le match, il est convaincu qu’il faut s’entraîner
dur et, à ses yeux, c’est une question de passage de flambeau. Il sait qu’il n’est pas éternel et
que Momo est à la hauteur pour assurer la relève. Jusqu’au bout, Michel est protecteur avec
Momo, comme un ami, un grand frère, un père. Il tient à ce que, lorsqu’il ne sera plus là, il y ait
quelqu’un de présent pour les enfants. Il n’a donc d’autre choix que d’être dur et de lui dire
« si tu te plantes, tu décevras beaucoup d’enfants. Et dix minutes, c’est beaucoup dans la vie
d’un enfant ». Il le teste aussi pour voir si Momo est vraiment investi, ou s’il est un rigolo qui
va baisser les bras à la première difficulté. Car il lui explique qu’il va désormais faire partie
intégrante de leur vie.
VOUS N’AVEZ JAMAIS EU PEUR DE PARLER D’ENFANTS ATTEINTS DE MALADIES GRAVES
DANS UNE COMÉDIE ?
Il n’y a rien de mieux que l’humour pour faire passer des messages. Mais c’était une volonté de
ma part de ne pas développer les pathologies de chacun : on sait que l’histoire se déroule dans
un hôpital et cela n’apportait rien de nommer les maladies. Le plus important, c’était de montrer
que ces enfants n’aspirent qu’à une chose : qu’on les regarde comme des enfants, pas comme
des enfants malades. D’ailleurs, ils ne ménagent pas Momo au départ. C’était mon parti pris : je
ne voulais pas qu’on voie un enfant faire une chimio ou suivre un traitement lourd, mais qu’on le
voie en train de se comporter comme un enfant !
AU FOND, LES ENFANTS LUI APPORTENT AUTANT QU’IL LEUR APPORTE…
C’est ce qu’on comprend vraiment à la fin : Momo s’est dit qu’il allait passer ses derniers instants
aux côtés de ces enfants pour leur transmettre une joie de vivre, tandis que ces derniers, en
retour, lui permettent de réaliser son rêve : faire rire, se sentir utile. C’est comme un échange de
bons procédés : le clown est réconforté de faire rire les enfants, et les enfants y trouvent de la joie.
TOUT À COUP, MOMO DÉCOUVRE LA DISCIPLINE, L’EFFORT, L’ALTRUISME.
Il se dit « j’ai passé des castings, ça ne marche pas, je ne fais rire personne et je suis enfin
quelqu’un, dans un endroit que je fuyais à cause de ma maladie ». Le destin a voulu que Momo
suscite le rire dans un endroit qu’il déteste en tant que malade. Mais cela lui permet aussi de ne
pas se morfondre car il y a pire que sa situation. Ce qui est très particulier, c’est qu’il encourage
les enfants à se soigner, et qu’il se bat notamment avec Lola pour qu’elle se soigne, alors que
lui-même ne se soigne pas.
LES ENFANTS SONT TOUS D’ÂGES DIFFÉRENTS, CE QUI AJOUTE À LA DIFFICULTÉ, MAIS
AUSSI À LA RICHESSE DU GROUPE.
Dans les services hospitaliers, on vous classe par maladie, pas par tranche d’âge. C’est pour cela
que Lola s’ennuie : elle n’est pas avec des jeunes de son âge. Alors qu’elle a envie de vivre et de
sortir, on l’en empêche : on lui dit qu’elle va rester plus longtemps à l’hôpital et elle se retrouve
avec des gamins. Autant dire qu’elle n’a aucun intérêt pour le cirque ou pour les clowns !
COMMENT S’EST PASSÉ LE CASTING DES ADULTES ?
Comme il s’agit de mon premier long métrage, je ne voulais aucune star, aucun comédien confirmé,
parce que je me disais que ce film s’inscrit dans un esprit de passage de relais. Mais cela ne m’a
pas empêché d’engager des gens extraordinaires, comme Fanny Dumont, formidable comédienne
belge, qui joue l’infirmière. Ou encore Gérard Giroudon, qui campe Michel et qui est sociétaire
de la Comédie Française. Au casting, j’ai été charmé par son regard, par sa manière de parler, et
la complicité entre nous a été une évidence pendant les répétitions.
ET LES ENFANTS ?
Je ne voulais pas engager d’enfants comédiens car je tenais à ce qu’ils dégagent quelque chose
d’assez frais pour jouer sur l’innocence de l’enfance. Après un casting traditionnel, on a organisé
des lectures et des ateliers pour qu’ils répètent les scènes une par une et pour que chacun sache
précisément ce qu’il avait à faire sur le plateau. J’ai expliqué à chacun quel était son rôle et le
contexte particulier du film : je leur ai parlé de ces enfants malades qui rêvent seulement de se
tenir debout. Il fallait vraiment les accompagner et faire de la pédagogie et il était fondamental
d’instaurer une complicité et un climat de rigolade avec eux.
AVEZ-VOUS EU DU MAL À TRAVAILLER AVEC EUX ?
On a répété les scènes une par une pour que chacun sache ce qu’il avait à faire sur le plateau.
Les enfants ne sont pas comme des acteurs professionnels : s’ils se braquent, c’est fichu.
Heureusement, j’ai été éducateur de rue et j’ai un côté burlesque et cartoonesque en moi qui
m’a beaucoup aidé à les diriger. Et puis, ils me connaissaient, ce qui m’a permis d’installer cette
atmosphère de détente et d’humour. Au final, ils étaient hyper studieux et connaissaient
parfaitement leur texte. Certains ont même accepté de se raser la tête, ce qui n’était pas évident
pour des pré-ados. Personnellement, je crois que je préfère travailler avec des enfants car quand
ils t’apprécient, c’est plus facile qu’avec des adultes.
LES AVEZ-VOUS EMMENÉS À L’HÔPITAL POUR QU’ILS SE FAMILIARISENT AVEC LA MALADIE ?
On n’avait pas le droit car c’était juste après la pandémie. Mais de toute façon, je pense que cela
aurait été difficile car les enfants que j’allais voir à l’hôpital portent des charlottes, des blouses,
des masques. Je voulais aussi que mes petits acteurs conservent leur innocence. Je connais
même des adultes qui ont du mal à aller dans les hôpitaux et je n’ai pas voulu aller dans cette
direction.
LE TRAITEMENT DES COULEURS ET DE LA LUMIÈRE N’EST PAS LE MÊME À L’HÔPITAL ET
DANS LE MONDE EXTÉRIEUR
C’était voulu pour apporter de la joie dans un espace qui, par définition, en est souvent dépourvu.
À l’origine, je voulais tourner le film en noir et blanc, puis passer à la couleur uniquement au
moment où Momo arrive à l’hôpital. On a changé notre fusil d’épaule tout en gardant un peu
de cette inspiration, et Gaëlle a eu la formidable idée d’un traitement différencié des couleurs.
C’est ce qui permet de dédramatiser l’univers de l’hôpital : on ne voulait pas de murs tout blancs.
D’ailleurs, quand on va en service de leucémie ou de cancérologie, il y a plein de dessins et de
couleurs, et ce n’est ni morose, ni lugubre.
QUAND ON ENTRE DANS L’ESPACE DE MICHEL, À L’HÔPITAL, ON BASCULE DANS UN UNIVERS
FÉÉRIQUE, PRESQUE IRRÉEL
Sa loge, c’est son chez lui. Il y a là comme un film dans un film : ce vestiaire raconte sa vie, son
enfance, et c’était important car Michel est le seul qu’on ne présente presque pas et dont on
ne sait pas d’où il vient. Alors, ce vestiaire raconte un peu sa vie. Gérard a insufflé une vraie
puissance au personnage et m’a donné quelque chose qui n’était pas écrit : il a apporté une
touche d’émotion inédite qu’il a accentuée par son regard, par son envie de jouer. Il m’a confié
qu’il avait même pleuré en lisant le scénario. C’est ce qui m’a le plus touché chez lui : il était
heureux que j’aie pensé à lui et que je lui aie fait lire le scénario.
COMMENT VOUS ÊTES-VOUS RÉPARTIS LES RÔLES AVEC GAËLLE ?
Sur le tournage, elle était derrière la caméra. Je revoyais les prises, mais elle avait toute ma
confiance. De même qu’elle a eu cette idée magnifique de contraster les éclairages entre l’hôpital
et le monde extérieur, elle a aussi orchestré l’étalonnage. Elle me guidait, elle m’orientait pour
mes intonations ; et moi je gérais davantage le comportement des enfants.
Si on tournait une scène et qu’on faisait une prise en suivant mon intuition, on en tournait une
autre en se fiant à son propre regard, et on savait qu’on trancherait au montage. Il n’y avait pas
d’histoire d’ego entre nous. C’était très important de bien s’entendre et de me sentir épaulé. Je
n’aurais pas pu faire ce film tout seul. Gaëlle a été cette coéquipière qu’il me fallait et on a aussi
eu une équipe technique qui nous a très bien accompagnés.
QU’EST-CE QUE VOUS SOUHAITIEZ POUR LA MUSIQUE ?
Je ne voulais pas trop de musique car celle-ci sert parfois à cacher le jeu de certains comédiens.
Je disais à Gaëlle que le film possède déjà sa propre musicalité, que l’on perçoit dans le jeu et
le regard des protagonistes. Ajouter de la musique de manière gratuite n’avait aucun intérêt.
Je voulais le même thème, avec des variations rythmiques différentes : il ne fallait pas que la
musique vienne faire pleurer le spectateur et le prenne par la main. La musique apporte
essentiellement une touche de tendresse supplémentaire.
ENTRETIEN AVEC GAËLLE FALZERANA REALISATRICE
COMMENT AVEZ-VOUS RENCONTRÉ BOODER ?
On a été présentés par le producteur Jean-Rachid et on s’est immédiatement bien entendus :
même si on ne se connaissait pas, notre rencontre a été comme une évidence. Booder est, dans
la vie, exactement le même que dans ses spectacles. Généreux et accessible.
QU’EST-CE QUI VOUS A INTÉRESSÉE ET TOUCHÉE DANS SON PROJET ?
Au tout début, j’ai eu un peu peur car je n’avais jamais été confrontée à la problématique d’une
telle histoire et je me suis donc posé la question de ma légitimité. Les enjeux du projet m’ont
fait penser à Docteur Patch et donné envie d’y participer. Plus tard, Jean-Rachid et moi avons
pris conscience que le film avait aussi des résonances autobiographiques pour Booder. Ce qui
m’a également beaucoup touchée. Pudique, il voulait mettre en avant les enfants, les clowns et
leur rendre hommage : c’était leur histoire qu’il voulait raconter. J’ai alors eu encore plus envie
de défendre le projet et de raconter le parcours de chacun. Mon appréhension s’est dissipée. Il
n’était plus question de moi. Il s’agissait de défendre quelque chose de plus grand.
COMMENT VOUS ÊTES-VOUS DOCUMENTÉE ?
J’ai regardé beaucoup de reportages et j’ai lu le livre passionnant d’une femme clown Le rire
médecin – Journal du docteur Girafe (de Caroline Simonds et B. Warren), mais aussi la BD
L’Homme étoilé (de L’Homme étoilé). Deux livres magnifiques et forts en émotion. Nous étions
en pleine pandémie et il était impossible d’aller à l’hôpital. Mais quand les restrictions ont
été levées, on s’est rendu à l’hôpital Robert-Debré, on a rencontré des enfants et on a eu un
entretien avec un clown. Les contacts étaient facilités par le côté cartoonesque de Booder qui
séduisait immédiatement ses jeunes interlocuteurs.
QUELS CHOIX AVEZ-VOUS FAITS AU MOMENT DE L’ÉCRITURE ?
Toutes ces lectures et rencontres ont nourri mon imaginaire. Alors que, parfois, on se pose
beaucoup de questions à l’écriture, j’étais en possession d’une mine d’informations et je me
demandais même par où commencer. Il y avait énormément de choses à dire, et il y avait aussi
des zones sur lesquelles on était plus pudiques, mais on s’est fait plaisir car le sujet était
difficile en soi. En effet, à l’époque où on écrivait le scénario, on parlait beaucoup des hôpitaux
et on se demandait si notre projet n’était pas anxiogène en raison de la pandémie. Mais au bout
du compte, on s’est aperçu que ces enfants étaient généreux, souriants, solaires, et on a voulu
mettre la vie en avant.
COMMENT S’EST PASSÉE L’ÉCRITURE AVEC BOODER ?
On parlait beaucoup, je prenais des notes, et parfois sans même s’en rendre compte, Booder
lâchait des phrases qui étaient importantes. J’observais aussi Booder et Jean-Rachid discuter, je
m’imprégnais de leurs conversations et j’ajoutais ma touche personnelle. J’injectais ensuite de
la structure dans ces échanges, puis on continuait parfois à se parler avec Booder en distanciel,
on organisait des réunions, je m’isolais, je mettais de l’ordre dans nos idées, je proposais des
choses et Booder me donnait son avis. Notre grande chance, c’est qu’on se comprenait tout de
suite et quand je sentais la fragilité de ce que j’avais écrit, il le sentait aussi. C’était d’autant plus
efficace qu’on avait le même objectif.
QUELLES ÉTAIENT VOS INTENTIONS POUR LA MISE EN SCÈNE ?
Avec Booder, on avait quelques références communes, comme Les Goonies ou Hook, et pour
certains plans, je me suis amusée à m’en inspirer, mais on a surtout cherché à être le plus sincère
possible dans la mise en scène. Booder me faisait totalement confiance et il était très à l’écoute,
ce qui était un soulagement pour lui et pour moi. Du coup, je ne voulais surtout pas le décevoir.
VOUS AVEZ CRÉÉ UN UNIVERS CHALEUREUX À L’HÔPITAL GRÂCE AUX ÉCLAIRAGES.
Dès le tournage, on a eu l’idée de marquer une différence entre le monde extérieur et l’hôpital :
à partir du moment où Momo trouve sa place, c’est le cœur qui le guide, et je voulais alors
privilégier des couleurs chaudes. Et plus le film évolue, plus les couleurs sont saturées, et plus
l’ambiance est colorée. J’en ai parlé à Booder et cette idée lui a plu.
AVEZ-VOUS PARTICIPÉ AU CASTING ?
Avec Booder, on avait la volonté commune de ne pas engager de stars car on n’avait pas de
grande prétention et qu’on voulait donner leur chance à des gens talentueux, mais qui n’étaient
pas forcément connus. On a aussi recherché des acteurs de théâtre qui n’avaient pas beaucoup
travaillé pour le cinéma, comme Gérard Giroudon, qui vient de la Comédie Française. Mais quand
on a vu le duo qu’il formait avec Booder, on a compris qu’on tenait notre Michel. Ils sont très
différents, mais ils se complètent parfaitement : quand je donnais un texte à Gérard, il le respectait
à la virgule près, alors que Booder se l’appropriait totalement et le modifiait à sa guise. Par moments,
Gérard était désarçonné car il ne reconnaissait pas la réplique de son partenaire, mais il a vite
compris et cela a très bien fonctionné. Il fallait donc les diriger de manière très différente : autant
il ne fallait pas faire répéter Booder pour ne pas perdre sa fraîcheur, autant il était essentiel de
travailler en amont avec Gérard pour le rassurer. Pourtant, au moment de dire « Action », c’était
surprenant de voir des comédiens aux méthodes si différentes s’accorder.
QUELS RAPPORTS AVEZ-VOUS NOUÉS AVEC LES ENFANTS ?
Ils ont été adorables. Je m’étais imaginé toutes sortes de méthodes pour travailler avec eux,
mais à l’arrivée, c’est Booder qui les a approchés comme un grand enfant. Le travail était ludique.
Ce qui ne m’a pas empêchée de nouer des liens forts avec eux. Notre priorité absolue, c’était de
faire en sorte que nos petits comédiens ne soient pas mal à l’aise. Par exemple, on avait prévu
que l’un des plus petits se balade en slip, mais lorsqu’on a vu que cela ne lui plaisait pas, on lui
a proposé de porter un short. On ne tire rien des enfants si on les braque et, là encore, on se
rejoignait avec Booder.
COMMENT VOUS ÊTES-VOUS RÉPARTIS LES RÔLES SUR LE PLATEAU ?
Booder amusait les enfants, tandis que j’étais davantage à la lumière et au cadre. J’installais un
vrai dialogue avec les jeunes comédiens pour mieux les comprendre, les connaître et les diriger
sur le plateau. C’est comme cela que j’ai noué une relation avec la plus grande, Adèle. Encore
aujourd’hui on se parle toutes les semaines. J’étais aussi en contact direct avec les équipes et le
chef-opérateur. Parfois, quand on était en désaccord de mise en scène avec Booder, on tournait
deux prises différentes en se disant qu’on déciderait laquelle on garderait par la suite.
VOUS JOUEZ MÊME UN PETIT RÔLE DANS LE FILM !
Au tout début, ce n’était pas mon histoire, et à mesure que le temps est passé, c’est aussi devenu
mon film – je me suis attachée aux personnages, à l’histoire, et alors qu’il n’était pas du tout prévu
que je participe à la réalisation, c’est devenu évident pour Booder et les producteurs. Vers la fin,
j’ai eu envie d’apparaître à l’image, mais c’était un désir que je n’assumais pas vraiment, même si
je m’interrogeais sur l’envie d’être comédienne à une époque où je me cherchais encore. Booder
m’a fait passer un casting : je savais exactement ce que le personnage devait faire, je ne ressentais
aucune pression, Booder m’a accompagnée et m’a encouragée. Au moment des auditions, je me
suis rendu compte que le réalisateur avait autant besoin du comédien que l’inverse et qu’il s’agit
d’un travail d’équipe. Dès que j’en ai pleinement pris conscience, j’ai osé tenter l’aventure.
Source: Communiqué officiel