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Maroc : enjeu du financement des projets structurants

Ces deux dernières années, le Maroc s’est engagé dans un ambitieux programme de modernisation de sa société et de son économie. L’ajout récent de trois projets de grande envergure, notamment le développement des régions montagneuses, l’organisation de la Coupe du Monde et un vaste programme d’habitat, soulève des interrogations sur les modalités de financement. La question fondamentale qui émerge est la suivante : le Maroc dispose-t-il des ressources nécessaires pour concrétiser ses ambitions ? De nombreux observateurs s’interrogent face à la succession de projets d’une ampleur considérable que le pays s’est fixée comme objectif de réaliser dans un laps de temps relativement court.

Pour donner un aperçu de ces chantiers, il est pertinent de mentionner : la généralisation de la protection sociale et de la couverture médicale, l’amélioration de l’éducation et du système de santé, la création d’un nouvel écosystème dans les montagnes de l’Atlas, la mise en place et/ou l’amélioration de l’environnement pour accueillir la Coupe du Monde 2030, un ambitieux programme d’accès au logement pour diverses catégories sociales, un plan hydrique, l’établissement d’un nouveau modèle économique décarboné avec un volet « Hydrogène », la modernisation industrielle à travers le Fonds Mohammed VI et un programme ambitieux de substitution des importations, la valorisation de la roche phosphatée grâce à l’hydrogène, la mise en place de Gigafactories et autres moteurs de l’industrie nationale et des exportations, ainsi qu’une révision à la hausse des ambitions dans le secteur du tourisme. Un programme vaste et ambitieux !

Ainsi, quelle est l’estimation des coûts de tous ces projets pour les finances publiques d’ici 2030 ? En l’absence d’informations provenant de sources officielles, une analyse a été réalisée pour aboutir à une estimation de 900 milliards de dirhams, toutefois, cette évaluation n’engage que son auteur.

En regard de cette somme, plusieurs ressources sont envisagées. D’abord, l’augmentation annuelle des recettes budgétaires due à la croissance économique. Dans le budget de 2023, ces recettes s’élèvent à 294 milliards de dirhams et sont prévues atteindre 311 milliards dans le projet de budget 2024, soit une croissance annuelle de 5,7% (17 milliards de dirhams). En arrondissant cette progression à 6%, cela représenterait des recettes supplémentaires d’environ 150 milliards de dirhams d’ici 2030, à condition de maintenir un taux de croissance économique similaire. Un tiers de ce montant serait alloué au bon fonctionnement de l’État, tandis que le reste (100 milliards) serait destiné aux projets structurants. Il resterait ainsi 800 milliards de dirhams à trouver. En envisageant une contribution de 10% sous forme de dons et d’aides, cela réduirait le montant à trouver à 710 milliards de dirhams.

Pour combler ce déficit, le budget de l’État dispose de trois sources de financement : les impôts et taxes, les contributions des entreprises publiques excédentaires et l’endettement. Est-il possible de solliciter ces ressources différemment pour couvrir les 710 milliards manquants ?

Dans cette perspective, des propositions ont été formulées à plusieurs reprises par l’auteur de ces lignes, anticipant cette situation de financement engendrée par la mise en œuvre de projets ambitieux. Ces propositions ont été partagées dans Le360.

Actuellement, les recettes fiscales s’élèvent à 280 milliards de dirhams dans le projet de budget 2024, représentant environ 20% du PIB prévisionnel de 1400 milliards de dirhams. Il est suggéré par plusieurs acteurs, y compris le FMI, d’augmenter cette pression fiscale pour l’aligner à 30% du PIB, semblable à d’autres économies comparables.

Comment et pourquoi ? Il ne s’agit pas de charger davantage les citoyens et les entreprises transparentes, mais plutôt d’élargir la base fiscale (c’est-à-dire la population assujettie à l’impôt) pour atteindre progressivement 30% du PIB, en incluant ceux qui ne contribuent pas ou contribuent très peu par rapport à leurs revenus. Ceci n’exclut pas le maintien du statut spécial du secteur agricole et le soutien nécessaire à nos exportations. Avec une croissance économique moyenne annuelle de 3,5% jusqu’en 2030 et une augmentation annuelle de 1,5% de la pression fiscale à partir de 2025, pour atteindre 29% six ans plus tard, ces hypothèses permettraient de collecter 590 milliards d’ici 2030, par rapport aux 150 milliards évoqués précédemment.

Cette démarche renforcerait l’État dans sa dimension sociale et favoriserait très certainement la croissance. L’État se transformerait en un mécanisme de redistribution en encourageant une meilleure allocation des ressources et une réduction des inégalités (comme indiqué par le coefficient de Gini).

Concernant la dette publique, sa taille et sa qualité ne devraient pas susciter de préoccupations majeures en matière de décision économique. Maintenue à des niveaux raisonnables par rapport au PIB (70%), elle se répartit à hauteur de 75% en dette interne et 25% en devises (hors engagements hors bilan). Dans le contexte actuel du Maroc, et avec des réserves en devises disponibles, les exportations de produits manufacturés, le développement du tourisme et les transferts des Marocains résidant à l’étranger, il est envisageable de recourir à des emprunts extérieurs supplémentaires pour renforcer un système productif plus cohérent, capable de valoriser les investissements massifs réalisés dans les infrastructures du pays.

Les entreprises publiques contribuent de manière limitée aux finances publiques, ce qui peut sembler surprenant. Tout en conservant la participation majoritaire de l’État, il serait envisageable d’introduire en Bourse les entreprises répondant à des critères d’éligibilité et de préparer les autres à cette éventual

Source : Le360 

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