Restauration : la sous-déclaration à la CNSS bat son plein!

Avec plus de deux millions de travailleurs dans le secteur des cafés et restaurants au Maroc, le contraste avec les 161.998 salariés déclarés à la CNSS en octobre 2024 est frappant. Un écart révélateur du fort taux d’emploi informel dans cette industrie, où la majorité des employés ne bénéficient ni de contrat de travail, ni de couverture sociale.
Un secteur sous-déclaré et mal encadré
D’après la Fédération nationale des utilisateurs des cafés et restaurants, environ 250.000 établissements opèrent à travers le pays, alors que la Fédération nationale des propriétaires des cafés, restaurants et unités touristiques du Maroc (FNACRUTM) en recense 200.000. Pourtant, les données de la CNSS ne reflètent pas cette réalité : les effectifs déclarés ont à peine progressé de 3% en un an, avec une masse salariale atteignant 725,92 millions de dirhams (+6,1%).
Les conditions de travail restent précaires : journées de onze heures, tâches supplémentaires non rémunérées, salaires parfois limités à 1.000 dirhams, bien en dessous du SMIC. Dans une correspondance adressée au ministre de l’Inclusion économique, de la Petite Entreprise, de l’Emploi et des Compétences, les représentants du secteur ont formulé plusieurs revendications, notamment l’octroi d’une carte professionnelle et l’interdiction pour les employeurs de prélever une part des pourboires, conformément aux articles 376 à 381 du Code du travail.
Fraude sociale et manque de contrôle
Le consultant en droit social, Mohammed Emtil, cité par L’Économiste, met en lumière une fraude courante : certains employeurs déclarent leurs salariés sans verser à la CNSS les cotisations prélevées à la source. Il souligne que le contrôle des irrégularités repose sur la CNSS et le ministère de l’Emploi, mais que les moyens alloués aux inspecteurs restent insuffisants. Pour remédier à ces dérives, il préconise l’exigence d’une attestation de conformité CNSS pour toute demande administrative liée aux cafés et restaurants.
Une fiscalité asphyxiante pour le secteur
Le président de la FNACRUTM, Mohammed Bouzit, estime que l’absence de tutelle ministérielle claire pénalise le secteur, déjà lourdement taxé. Les contrôles intensifiés de la CNSS, assortis de sanctions financières, ont conduit à la fermeture de nombreux établissements, mettant en péril l’emploi et la viabilité des entreprises. Il appelle les autorités à prendre en compte ces difficultés avant de durcir les sanctions.
Face à cette situation alarmante, une réforme structurelle du secteur s’impose, combinant contrôles renforcés, incitations à la déclaration des employés et allègement fiscal, afin de garantir un équilibre entre protection des travailleurs et pérennité des entreprises.