Crise mondiale du vin, une consommation en chute libre, au plus bas depuis 1961

Le monde du vin traverse une crise sans précédent. En 2024, la consommation mondiale a atteint son niveau le plus bas depuis plus de soixante ans, tombant à 214,2 millions d’hectolitres selon l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV). Une baisse de 3,3 % par rapport à 2023, qui confirme une tendance structurelle entamée il y a déjà plusieurs années.
Même les bastions historiques du vin n’échappent pas à l’essoufflement de la demande. En France, la consommation a reculé de 3,6 % en un an. Depuis 2018, le marché mondial a vu ses volumes s’effriter de 12 %, avec des reculs marqués aux États-Unis (-5,8 %) et en Chine. Ce repli généralisé reflète une mutation des habitudes de consommation, particulièrement chez les jeunes, qui privilégient d’autres boissons comme la bière.
Mais la demande en berne n’est qu’un volet d’une crise plus large. Du côté de l’offre, 2024 s’est aussi révélée catastrophique. La production mondiale a chuté de 4,8 %, à 225,8 millions d’hectolitres, un niveau historiquement bas également, jamais vu depuis 1961. L’Europe, qui assure encore 61 % de la production globale, a connu sa pire récolte du siècle, victime de conditions climatiques extrêmes allant des excès de pluie à des épisodes de sécheresse prolongée.
Dans ce contexte, les grands pays producteurs ont vu leur rendement s’effondrer. La France, pourtant deuxième producteur mondial, a reculé de 23 %, avec 36,1 millions d’hectolitres, soit sa plus faible production depuis 1957. L’Italie, avec 44 Mhl, reprend la première place malgré une baisse. L’Espagne (31 Mhl) et les États-Unis (21,1 Mhl, -17,2 %) affichent également des résultats en nette baisse. Même l’hémisphère Sud, habituellement plus stable, a subi sa plus mauvaise année depuis deux décennies.
Autre conséquence directe de cette double peine – baisse de l’offre et repli de la demande – : une explosion des prix. Depuis 2019-2020, le coût moyen du vin a bondi de 30 %, en raison de l’inflation, de la rareté des volumes disponibles et de la flambée des charges de production. Face à cette hausse, de nombreux consommateurs réduisent leurs achats, transformant le vin en un produit de luxe occasionnel.
Seule éclaircie dans ce tableau sombre : les exportations ont tenu bon. En 2024, elles ont rapporté 35,9 milliards d’euros, soutenues par un prix moyen record de 3,60 € le litre. Une performance plus liée à la faiblesse de l’offre qu’à un réel dynamisme du marché. L’avenir, néanmoins, demeure incertain. Une éventuelle détente sur les prix pourrait redonner un peu d’élan à la consommation, mais tout dépendra aussi de la politique commerciale des États-Unis, en particulier sur les droits de douane.
Entre aléas climatiques, mutations sociétales et pressions économiques, la filière viticole se retrouve à un carrefour. Pour ne pas perdre définitivement sa place dans les habitudes des consommateurs, elle devra repenser ses modèles et s’adapter à un monde en profonde transformation.