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Clubs sportifs, pourquoi la greffe S.A. ne prend pas?

La transformation des clubs de football marocains en sociétés sportives, perçue comme une avancée majeure pour la professionnalisation du secteur, n’a pas encore produit les effets escomptés. Malgré des investissements conséquents, le modèle peine à s’imposer en raison de problèmes structurels et de gouvernance.

Des fonds détournés de leur objectif initial

Depuis l’adoption de la loi 30.09 sur l’éducation physique et le sport, chaque club de première et deuxième division a reçu une aide de 7 millions de dirhams, soit un total de 2,24 milliards de dirhams injectés par le ministère de tutelle et la Fédération royale marocaine de football (FRMF). Ces fonds devaient servir à structurer les clubs en sociétés sportives et à créer une base financière solide.

Cependant, la majorité des clubs ont utilisé ces subventions pour payer les salaires des joueurs et des entraîneurs, au lieu de les investir dans le développement de leurs structures. Ainsi, bien que tous les clubs aient modifié leurs statuts pour se conformer à la réglementation et obtenir leur agrément, la transformation en véritables entités économiques indépendantes reste largement inachevée.

Un manque d’indépendance chronique

L’un des principaux obstacles réside dans l’emprise des associations sportives sur les sociétés nouvellement créées. En effet, les statuts actuels permettent à l’association mère de détenir la majorité des actions et de nommer les membres du conseil d’administration, ce qui limite fortement l’autonomie de la société sportive.

Cette situation est encore plus marquée dans les clubs monosports, où le bureau directeur garde un contrôle total sur la gestion de l’équipe. Dans les clubs omnisports, chaque section désigne ses représentants au sein de l’association, qui conserve in fine la mainmise sur la société sportive. Conséquence : les mêmes dirigeants continuent à cumuler les postes et à appliquer des méthodes de gestion qui n’ont pas évolué avec la réforme.

Ainsi, la gestion des finances et des subventions reste aux mains des associations, ce qui ralentit la prise de décision et maintient un système opaque peu propice au développement économique des clubs.

Un échec à attirer l’investissement privé

L’un des objectifs clés de la réforme était d’attirer des investisseurs privés pour dynamiser le football marocain. Or, le modèle actuel ne leur laisse que peu de marges de manœuvre. La majorité des actions étant détenue par l’association sportive, les investisseurs potentiels ne disposent pas du contrôle nécessaire pour garantir un retour sur investissement.

De plus, la gestion des actifs des clubs (stades, centres de formation, droits commerciaux) reste sous l’autorité de l’association, ce qui limite les opportunités de valorisation et complique les négociations avec d’éventuels sponsors. Cette absence de transparence a conduit à une diminution du nombre de partenaires économiques engagés dans le football marocain.

Une réforme à revoir

Pour que la transformation en sociétés sportives soit une réussite, il est impératif de revoir le cadre juridique afin de garantir une véritable indépendance des sociétés par rapport aux associations. Une meilleure gouvernance, plus de transparence financière et un partage plus équilibré du capital entre l’association et les investisseurs privés seraient des leviers essentiels pour rendre le football marocain plus attractif et compétitif à l’international.

En l’état actuel, le projet de sociétés sportives semble avoir changé la forme sans modifier le fond.

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