slideNewsService public

Pourquoi l’Administration ignore-t-elle les recommandations du Médiateur du Royaume ?

Le dernier rapport de l’Institution du Médiateur, publié au Bulletin Officiel, met en lumière un problème persistant : l’administration applique très peu ses recommandations. Entre 2019 et 2023, sur 1.420 recommandations émises, seules 242 ont été suivies d’effet, soit à peine 17 %.

Selon une analyse de l’universitaire Abdellah Gouaârous, plusieurs raisons expliquent cette inertie administrative.

Un manque d’ancrage institutionnel
Historiquement, la médiation administrative au Maroc était assurée par le Diwan Al Madalim, une institution proche du Palais. Mais avec la création du Médiateur du Royaume en 2011, sur un modèle occidental, l’institution a gagné en indépendance mais perdu en influence. Ce changement, bien que garantissant sa neutralité, l’a aussi isolée du système décisionnel de l’État.

Une absence de pouvoir contraignant
Contrairement à d’autres modèles internationaux, le Médiateur marocain ne dispose pas d’un pouvoir coercitif. La loi 14-16 qui régit son action ne lui accorde aucun moyen d’imposer ses recommandations à l’administration. Son rôle est donc limité à la suggestion et la médiation, ce qui le prive d’un levier efficace pour faire appliquer ses décisions.

Un déficit de reconnaissance
Le concept de médiation est souvent mal interprété. Plutôt que de rééquilibrer la relation entre administration et citoyens, l’institution est parfois perçue comme une instance neutre sans réel pouvoir d’arbitrage. À l’international, certains pays ont choisi des termes plus forts comme « Défenseur du peuple » en Espagne ou « Ombudsman » en Scandinavie, qui renforcent l’autorité de ces institutions.

Une administration rigide et bureaucratique
Enfin, la nature même de l’administration marocaine explique cette réticence au changement. La bureaucratie est une structure rigide, où toute remise en question des pratiques existantes est difficile. Sans volonté politique forte ou personnalités influentes à la tête des administrations, les recommandations du Médiateur risquent de rester lettre morte.

Pour que cette institution joue pleinement son rôle, il serait nécessaire de renforcer son pouvoir légal, de mieux intégrer ses recommandations dans le processus administratif et de favoriser une culture du changement au sein des administrations publiques.

Avec Al Ayyam

Laisser un commentaire

Bouton retour en haut de la page
×