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Céréales : aucune obligation réglementaire pour constituer et gérer un stock de sécurité

L’avertissement est clair : alors que le Maroc dépend de plus en plus des importations de blé, le pays opère toujours sans cadre obligatoire pour constituer et gérer un stock stratégique de céréales. Le Conseil de la concurrence tire la sonnette d’alarme dans un avis consacré au fonctionnement du marché des moulins, et pointe une faille qui expose directement la sécurité alimentaire nationale.

Au cœur du problème, un paradoxe : la loi confie bien à l’ONICL la mission de bâtir un stock de sécurité, mais aucun texte d’application ne vient fixer les règles de constitution, de financement ou de gestion de ces réserves. Résultat, l’Office se retrouve sans base légale solide pour anticiper les tensions sur l’offre, au moment même où les aléas climatiques, les sécheresses répétées et les turbulences géopolitiques rendent l’approvisionnement mondial plus incertain que jamais.

Le Conseil insiste : il est urgent d’adopter ce cadre réglementaire afin de protéger la chaîne d’approvisionnement, renforcer la résilience du pays et garantir l’accès aux céréales dans toutes les situations. Une condition indispensable dans un marché où la minoterie, pilier de la sécurité alimentaire, reste extrêmement dépendante des performances agricoles nationales… et surtout des cargaisons importées.

Au-delà du stock stratégique, l’avis analyse une filière céréalière secouée par plusieurs déséquilibres : excès de capacité de production, dépendance accrue à l’importation, interventions publiques multiples, et compétitivité mise à mal. Le Conseil juge que l’ensemble du secteur traverse une phase critique où les fragilités structurelles deviennent trop visibles pour être ignorées.

Les mécanismes de soutien illustrent bien cette situation. S’ils ont permis pendant des années de stabiliser le prix du blé tendre et de protéger le pouvoir d’achat, ils montrent désormais leurs limites. Les aides publiques profitent massivement aux importateurs – jusqu’à 85% en 2022 – pendant que les agriculteurs locaux voient leur part reculer. Ce déséquilibre réduit l’incitation à produire localement et affaiblit la souveraineté alimentaire du Royaume, alors même que celle-ci devrait être renforcée.

Le Conseil appelle ainsi à revoir en profondeur le modèle de soutien : rééquilibrer la répartition de la valeur ajoutée, mieux cibler les aides, et redonner une place centrale aux producteurs marocains. C’est ce socle national, insiste-t-il, qui doit servir de première ligne de défense face aux perturbations extérieures.

En filigrane, un message fort : sans réforme du cadre juridique et sans gouvernance robuste du stock stratégique, la filière céréalière marocaine restera vulnérable. Et avec elle, l’ensemble de la sécurité alimentaire du pays.

Avec Al Akhbar

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