Un déséquilibre nutritionnel croissant

Les conséquences se lisent directement dans les assiettes. Le régime traditionnel marocain, riche en céréales complètes, légumineuses et produits frais, cède la place à une alimentation standardisée dominée par le pain blanc, le sucre et les produits transformés.
La consommation de légumineuses, source de protéines végétales de qualité, s’est effondrée. Elle est passée de 10,7 kg par habitant dans les années 1980 à seulement 3,6 kg en 2024. Et ces cultures ne représentent plus que 3 % des surfaces agricoles du pays, concentrées dans quelques régions du nord comme le Saïss ou la Chaouia. Résultat : la production nationale stagne autour de 280.000 tonnes par an, alors que les importations atteignent 135.500 tonnes, principalement en provenance du Canada et de Turquie.
En parallèle, la production animale, surtout avicole, a explosé grâce aux importations de maïs et de soja d’Argentine, du Brésil et des États-Unis. Entre 1980 et 2024, la production de viande de volaille est passée de 70.000 à 734.000 tonnes, et celle d’œufs de 666 millions à 6,4 milliards. Ce modèle offre une illusion d’autosuffisance mais repose sur des intrants étrangers coûteux et à forte empreinte carbone.
Cette évolution se traduit par un déséquilibre nutritionnel croissant : trop de calories, peu de diversité, et une dépendance accrue à des produits dont les chaînes d’approvisionnement échappent au contrôle national.