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Maroc : la population âgée dépasse 5 millions et progresse à un rythme inédit

Le Maroc est entré dans une phase de vieillissement démographique soutenu. Les données définitives du Recensement général de la population et de l’habitat (RGPH) 2024, publiées par le Haut-Commissariat au Plan (HCP), révèlent que le pays compte désormais 5,027 millions de personnes âgées de 60 ans et plus, contre 3,168 millions en 2014 et 2,376 millions en 2004.

En vingt ans, l’effectif des seniors a donc plus que doublé, avec une accélération marquée sur la dernière décennie. Entre 2014 et 2024, la population âgée a progressé à un rythme annuel moyen de 4,73 %, alors que la croissance de la population totale n’a pas dépassé 0,83 % sur la même période.

Cette évolution modifie profondément la structure par âge du pays. La part des personnes âgées est passée de 8 % en 2004 à 13,8 % en 2024. À l’inverse, la proportion des moins de 15 ans a reculé de 31 % à 26,5 %, tandis que celle des 15-59 ans s’établit désormais à 59,7 %. Le rapport entre personnes âgées et jeunes a doublé en vingt ans, passant de 26 à près de 52 seniors pour 100 jeunes.

Cette mutation s’explique par la poursuite de la transition démographique. L’indice synthétique de fécondité est tombé à 1,97 enfant par femme, en dessous du seuil de remplacement des générations, tandis que l’espérance de vie atteint désormais 77,2 ans, contre 74,8 ans en 2010.

Le vieillissement est également marqué par une forte féminisation. En 2024, les femmes représentent 51,2 % des personnes âgées. À partir de 65 ans, elles deviennent majoritaires, et au-delà de 80 ans, on ne compte plus que 78 hommes pour 100 femmes, reflet d’une longévité plus élevée mais aussi de trajectoires sociales souvent plus fragiles.

Sur le plan territorial, le phénomène progresse plus rapidement en milieu urbain, où vivent désormais près de 64 % des seniors, contre un peu plus de la moitié en 2004. Les disparités régionales sont nettes. Les régions de l’Oriental (16,1 %) et de Béni Mellal-Khénifra (15,2 %) affichent les taux de vieillissement les plus élevés, tandis que les régions du Sud restent plus jeunes, avec 4,8 % à Dakhla-Oued Eddahab.

Le rapport de dépendance des personnes âgées est passé de 13,1 seniors pour 100 actifs potentiels en 2004 à 22,8 en 2024, traduisant une pression croissante sur la population en âge de travailler. Selon les projections du HCP, ce ratio pourrait atteindre 39 pour 100 à l’horizon 2050, avec près de 10 millions de personnes âgées, soit près d’un quart de la population.

Au-delà des chiffres, les conditions de vie des seniors révèlent des fragilités persistantes. Près de 58 % des personnes âgées sont analphabètes, avec un taux dépassant 72 % chez les femmes. Le taux d’activité reste faible, à 16,1 %, et l’accès à la retraite demeure limité, notamment pour les femmes, dont seulement 6,7 % perçoivent une pension.

Sur le plan sanitaire, 18,5 % des personnes âgées vivent avec un handicap, une proportion qui augmente fortement après 75 ans. Si la couverture médicale atteint 69,2 %, des écarts subsistent entre milieux urbain et rural. Les conditions de logement restent également contrastées, notamment en zone rurale, où l’accès à l’eau, à l’assainissement et aux équipements de base demeure limité.

Les données du RGPH 2024 confirment ainsi que le vieillissement est devenu une transformation structurelle majeure de la société marocaine. Par son ampleur et sa rapidité, il pose des défis importants en matière de protection sociale, de santé, de logement et de solidarité intergénérationnelle, appelant des réponses publiques durables et adaptées.

Avec Barlamane

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