PESTICIDES ... LA VÉRITÉ SUR UN POISON LÉGAL!

Produits toxiques, le Maroc poubelle de l’Europe ?!

Une longue liste de molécules de pesticides sont autorisées au Maroc. pourtant certaines, classées hautement dangereuses et interdites dans plusieurs pays, continuent d’être utilisées dans nos champs. Zoom sur un scandale tu!

Après le scandale de l’importation du Maroc des déchets de certains pays européens, une autre révélation a eu l’effet d’une bombe : le Maroc importerait des pesticides bannis par l’Europe.
L’annonce a été faite en septembre 2020 par les organismes internationaux Public Eye et Greenpeace Unearthed, qui, suite à une enquête, ont révélé
que les pays membres de l’UE ont approuvé, en 2018, l’exportation de 81.615 tonnes de pesticides contenant des substances interdites sur leurs
propres sols en raison de risques inacceptables pour la santé ou l’environnement.
Au total, 41 pesticides interdits ont été annoncés à l’exportation depuis l’UE en 2018. Les risques sanitaires ou environnementaux associés à ces substances sont dramatiques : mortels en cas d’inhalation, malformations congénitales, troubles de la reproduction ou du système hormonal, cancer, contamination des sources d’eau potable, toxicité pour les écosystèmes.
Le Maroc serait l’un des dix principaux importateurs de ces pesticides interdits.
Comme le montre une carte établie par les deux organismes, le Maroc serait même le plus grand importateur en Afrique, devant l’Afrique du Sud,
l’Egypte et le Soudan. Parmi les substances bannies par les normes européennes de protection de la santé et de l’environnement, il y a la dichloropropène.
L’enquête note que le Royaume en a importé de grandes quantités auprès de sociétés espagnoles, belges et italiennes. « Au total, ce sont 1.350 tonnes et 1.900.000 litres de pesticides contenant cette matière qui sont entrés sur le territoire marocain en 2018 », estime l’enquête. Autre matière active interdite en Europe depuis 2007, en Suisse depuis 1989, et banni par plus de 50 pays à travers le monde : le Paraquat. Cet herbicide est massivement utilisé dans les monocultures de maïs, de soja ou de coton. Il serait à l’origine d’une toxicité aiguë pour les travailleurs agricoles qui l’épandent. Ce contact direct avec ce produit chimique pourrait aussi causer l’affaiblissement de la fonction pulmonaire, le parkinson ou encore plusieurs formes de leucémies.

UNE LONGUE LISTE DE POISONS

Au Maroc, 40 substances actives (ou 777 produits) des plus dangereuses étaient autorisées en 2018 pour un usage agricole.
20 autres substances (259 produits) sont homologuées quant à elles en tant que pesticides non agricoles. Ces données alarmantes sont tirées d’un rapport publié en mai 2020 par l’association marocaine santé, environnement et toxicovigilance sur les HHPs au niveau national.
L’association qui note qu’il n’y a aucune information sur le volume national d’utilisation des HHPs pour l’agriculture au Maroc, révèle qu’au total 58 HHPs parmi la PAN list, interdits dans d’autres pays, sont commercialisés au Maroc en confondant tous les usages (agricole et non agricole), ceci représente 15,34% de toutes les matières actives enregistrées au Maroc.
En effet, ces substances autorisées continuent d’être étudiées et certaines peuvent être retirées du marché en cas de nouvelles mises en cause scientifiques. Jusqu’à 2019, 33 matières actives ont été retirées du territoire pour cause de dangerosité. Rien qu’entre 2018 et 2020, l’ONSSA affirme qu’elle a retiré 15 matières actives du marché national. Rassurant ? «Pas vraiment. Les contrôles sont menés. Et les produits ne sont retirés que lorsqu’il y a une alerte au niveau international. On découvre donc un peu tard les risques de produits longtemps employés », regrette Bouazza Kherrati.

LE PLAIDOYER DE L’ONSSA

Suite aux résultats de cette enquête, l’ONSSA est sorti de son silence. « Suite à la publication récente d’un rapport par des organisations non gouvernementales sur l’exportation de pesticides non autorisés en Europe vers 85 pays, dont le Maroc, l’Office National de Sécurité Sanitaire des Produits Alimentaires « ONSSA » souligne que les importations marocaines en pesticides utilisés en agriculture représentent uniquement 2% du total des exportations de l’Union Européenne (UE) en ces produits. Il s’agit principalement des pesticides à base du 1,3 Dichloropropène, Paraquat et Cyanamide d’hydrogène. Le 1,3-Dichloropropène (1,3 D), représente en lui seul 87% de ces importations », explique l’office qui ajoute que pour le Dichloropropène, il est actuellement homologué et utilisé dans plusieurs pays à travers le monde, notamment les USA, le Japon, l’Australie. Par ailleurs, sur les 41 matières actives citées dans ledit rapport, l’office insiste que le secteur agricole marocain n’est concerné que par 8 matières actives dont 4 sont déjà retirées du marché national (Propargite, Atrazine, Carbendazime et Acétochlore).
Aussi, l’ONSSA a programmé le réexamen en 2021 du Paraquat, du 1,3-Dichloropropène, du Cyanamide d’hydrogène et du Triasulfuron. «Le processus de systématique, chaque fois qu’une matière active pose problème au niveau international et les risques sont prouvés par des études l’ONSSA procède au réexamen du produit sur la base des données disponibles dans les rapports d’experts mandatés par les organisations FAO/OMS et celles de la phytopharmacovigilance au niveau national», assure une source bien informée. Le même interlocuteur ajoute que l’ONSSA a déjà initié en juillet 2020 le processus de réexamen de 10 autres matières actives pour les soumettre à l’avis de la commission interministérielle de mars 2021. Donc, l’homologation des produits contenant ces matières est gelée pendant toute la période du réexamen. Et la décision du nouveau statut des matières concernées sera prise après avis de la commission. Ladite commission décide du retrait ou de la restriction d’usage des pesticides à base de la substance active en question.

QUI SONT LES PLUS GROS ACTEURS DU MARCHÉ DES PESTICIDES ?

Avec en moyenne 5 millions de tonnes de pesticides répandus chaque année dans le monde, les produits phytosanitaires représentent un colossal business de 60 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Un marché contrôlé par une poignée de multinationales, les Big Six (Bayer, Syngenta, DuPont, Dow, Monsanto et BASF), qui commencent à fusionner entre elles pour gagner encore en puissance. Au niveau national, les données du rapport de l’association marocaine santé, environnement et toxicovigilance sur les HHPs , montrent que le marché des phytosanitaires marocain est un marché à 90% privé dont toutes les multinationales les plus connues dans le domaine sont représentées, soit à travers leurs filiales soit à travers des sociétés marocaines de distribution. Le rapport estime que l’industrie de fabrication de produit phytosanitaire au Maroc est négligeable, puisque 95% des produits sont importés prêt à l’emploi, le reste est formulé localement. Par contre 35% à 45% du volume importé est reconditionné en petits emballages adaptés, aux petits besoins. Les derniers chiffres disponibles sur le volume d’importation remontent à 2013 avec 17 589 tonnes ce qui représente 1240 millions de dirhams en 2013/2014 et 1 236 millions de dirhams en 2015/2016. Les insecticides détiennent la première place (40% à 55%), suivi des fongicides (35% à 45%), puis les herbicides (10% et 15%), selon les années et les conditions climatiques.
Les cultures maraichères consomment 35% de ces produits, ensuite viennent les plantations (30%), puis les céréales (25%), enfin les cultures industrielles et autres (10%).

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