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Edito: Bab Darna, un scandale qui en dit long sur la prétendue protection des consommateurs!

Rouler 1.200 consommateurs dans la farine avec en prime 400 millions de dirhams qu’on est sûrs de ne jamais rembourser? C’est désormais possible au Maroc.

L’affaire Bab Darna est plus qu’un scandale, il s’agit là d’un crime économique organisé. Car comment sinon expliquer qu’une personne complètement lambda puisse du jour au lendemain devenir propriétaire d’une holding multi-secteurs, en possession de plusieurs terrains, lançant des projets immobiliers résidentiels à tour de bras?!

La réalité est que Mohamed El Ouardi, PDG Bab Darna, ancien banquier natif de Ouarzazate, aujourd’hui derrière les barreaux, n’a pas eu besoin de débourser le sou en achat de terrains pour s’autoproclamer promoteur immobilier et arnaquer 1.200 acheteurs dont une bonne partie de MRE.

Son modus operandi a reposé essentiellement sur de la publicité mensongère. En effet, Bab Darna a eu recours d’une façon massive et agressive à la publicité grand public: journaux, sites électriques, radio et même télé. L’on va même imiter les majors du secteur et se payer des spots télé en plein Ramadan avec des stars marocaines qui ont la sympathie et la confiance des gens. Le boulot des médias étaient de drainer la clientèle vers le points de vente; celle-ci est ensuite redirigée vers les sites devant voir sortir de terre les immeubles de rêve.

C’est la partie la plus scandaleuse de cette affaire. En effet, à proximité des terrains en question, Bab Darna se contenait de planter des panneaux publicitaires tape-à-l’œil, ramenait quelques machines de BTP pour simuler le démarrage des travaux et le conseiller commercial s’occuper du reste.

Les consommateurs étaient bien tentés de passer à l’acte notamment via des prix de rêve (voir photo ci-après) pour des biens immobiliers à proximité du centre de Casablanca. Ils n’hésitaient du coup pas trop à débourser les 30% d’avance qu’on leur demandait. Certains ont même misé plus pour bénéficier de prix encore plus bas.

Ce scandale soulève plusieurs questions relatives à la protection du consommateur à commencer par la réglementation sur la publicité mensongère. Que dit la loi en la matière?

En effet, la loi 31 08 de 2011 sur la protection du consommateur stipule bien entendu l’interdiction d’une telle pratique avec une sanction pouvant atteindre 1 million de dirhams par vente mais aucune peine d’emprisonnement. Idem pour les sanctions prévues par le Code de l’Urbanisme.

Il semble que l’emprisonnement actuel du PDG Bab Darna a été activé en vertu du Code du Commerce à cause de plusieurs chèques en bois.

Dans une récente sortie médiatique, Abdellatif Jouahri, Gouverneur de Bank Al Maghrib, avait fait allusion à une centaine de chèques en bois émis par la société, exprimant un certain étonnement quant au silence des banques concernées. Mais est-ce que la Banque Centrale n’avait pas accès au même type d’informations que les banques?! Pourquoi donc l’alerte n’a pas été déclenchée bien auparavant?

Le même type de laisser-aller est observé au niveau local. Il est bien difficile de ne pas s’étonner quant à l’attitude ambivalente des autorités locales (Mouqadem, Cheikh, Qaïd, etc.) qui sont capables de se déplacer en force au moindre coup de pioche non autorisé et laissent planter des panneaux publicitaires franchement mensongers!

On est là face au même type de business observés dans les rues avec les ferrachas et autres snacks ambulants mais à une échelle autrement plus grande avec des millions de dirhams en jeu!

Les victimes réclament aujourd’hui le remboursement pur et simple de leur mise mais où est l’argent? Comment 400 millions de dirhams ont pu s’évaporer dans la nature sans qu’on puisse en tracer l’itinéraire?!

La grossièreté de l’arnaque et l’énormité du scandale n’ont d’égal que le silence assourdissant du gouvernement et son chef PJD qui est capable de s’exciter pour un simple bulletin météo rédigé en Arabe et ne juge pas nécessaire de prendre la parole pour expliquer et rassurer autour de cette affaire qui met la crédibilité de l’Etat en jeu!

Ce qui est sûr est que El Ouardi n’agissait pas seul et avait plusieurs complices à commencer par le notaire. La réparation minimum que l’on exige en tant que citoyens et consommateurs est que la lumière soit faite sur l’ensemble des détails de ce crime économique. Cela dans l’immédiat. Il faudra ensuite agir sur le plan légal pour renforcer la loi sur la protection du consommateur et la publicité mensongère afin d’éviter bien en amont que de telles arnaques ne se produisent. Il faut aussi réfléchir au niveau des secteurs bancaire et immobilier à mettre en place un fonds de garantie pour pouvoir dédommager les consommateurs victimes de promoteurs filous ou défaillants.

Cela devient urgent.

A bon entendeur…

 

Par Nabil TAOUFIK

Directeur de Publication

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