Droit du travail : Changement de poste est-t-il un licenciement abusif ?
La cour de cassation répond

La loi définit le contrat comme une rencontre de volontés de personnes capables de s’engager sur un
objet. Le contrat de travail ne déroge pas à cette règle. En droit du travail la rédaction d’un contrat sous
une forme écrite n’est pas une obligation, le législateur a laissé à la volonté de l’employeur et du salarié
d’en décider. Conformément aux dispositions de l’article 15 du code du travail qui dispose ce qui suit :
« En cas de conclusion par écrit, le contrat de travail doit être établi en deux exemplaires revêtus des
signatures du salarié et de l’employeur légalisées par l’autorité compétente. Le salarié conserve l’un des deux
exemplaires.»
Ainsi, le contrat valablement formé ne peut être modifié que par le consentement mutuel du salarié et de
l’employeur, conformément aux dispositions de l’article 230 du code des obligations et des contrats qui
dispose ce qui suit :
« Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et ne
peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi. »
La cour de cassation, s’est exprimée par des arrêts rendus sur le sujet, à titre d’exemple, les arrêts
suivants :
« Si l’employeur a le pouvoir de gérer, d’organiser et de réorganiser l’entreprise, chaque fois que nécessaire,
cela ne signifie pas la modification du contrat de travail unilatéralement. Changeant le poste du salarié de
“Responsable de distribution” à “Standardiste” est considéré comme un acte abusif de nature à impacter le
salarié moralement, car il n’est pas compatible avec ses compétence professionnelles, et son refus de
rejoindre le nouveau poste n’est pas considéré comme abandon de poste, mais plutôt comme un
licenciement abusif, déguisé. » Arrêt de la cour de cassation N° : 429 en date du 26/04/2017 dossier N°
1082/5/2/2016.
« Attendu que s’il est vrai que l’employeur détermine les termes du contrat de travail en fonction des besoins
de travail, et que le salarié est obligé de se conformer à ses instructions, mais cela ne signifie pas que
l’employeur a le droit de changer le type de travail du salarié contre son gré, et de contrevenir à ce qui a été
précédemment convenu entre eux. La violation par l’employeur des termes du contrat de travail en
modifiant le type de travail confié au salarié implique sa responsabilité pour sa résiliation unilatérale et
abusive. Le salarié qui arrête le travail en raison de cette violation n’est pas considéré comme ayant
abandonné son poste.» Arrêt de la cour de cassation N° : 274/1 en date du 10/03/2020 dossier N°
1536/1/5/2019.
« Le fait de muter le salarié du lieu de travail précisé dans le contrat, contre son gré, et sans que le contrat
ne prévoit la possibilité de mutation, est considéré comme une violation du contrat de travail et des
dispositions de l’article 230 du code des obligations et des contrats.» Arrêt de la cour de cassation N° : 688
en date du 17/09/2002 dossier N° 1082/01.
La cour de cassation précise de façon claire que l’employeur de ne peut apporter aucune modification
substantielle au contrat, tel que changer la nature du travail, le lieu du travail, sauf si le salarié est
d’accord, et exprime son consentement. Dans le cas contraire, cette atteinte à l’objet du contrat est
considérée comme une résiliation unilatérale du contrat, assimilée à un licenciement abusif du salarié,
justifiant une action en justice pour réparation, suite à un licenciement abusif.
M. Adil Daoui