DossiersNuméro 35

Chantiers sociaux … Quel rôle pour les entreprises ?

Covid-19, crise économique, chantier de la protection sociale… interrogent le rôle de l’entreprise entant qu’acteur de la société. Ainsi l’entreprise se voit, tantôt, endosser des droits et obligations de citoyenneté et, tantôt à travers la RSE, interpellée sur sa contribution au bien-être sociétal et au développement durable.

Dans son discours adressé aux membres des deux chambres du parlement à l’occasion de l’ouverture de la 1ère session de la 3ème année législative de la 10ème législature en 2018, le Roi Mohammed VI a donné le ton : « La mobilisation nationale et le travail collectif demandent un climat sain et une solidarité renforcée entre les différentes franges de la société. C’est précisément à cela que nous employons par l’adoption de réformes, de mesures économiques et sociales visant à améliorer les conditions du vivre-ensemble en faveur de tous les marocains et à réduire les inégalités sociales et spatiales (…). Il convient aussi de mettre en place de nouveaux mécanismes susceptibles de renforcer la contribution du secteur privé dans la promotion du Social, et de l’inciter à prendre une part active dans l’amélioration des prestations offertes aux citoyens. Cette contribution doit se faire aussi bien dans le cadre de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) qu’à travers le lancement de Partenariats Public-Privé dans le domaine social », souligne le souverain. En effet, le rôle des entreprises privées est essentiel aujourd’hui pour réaliser cet objectif d’une société solidaire et équitable. En s’engageant dans une démarche de responsabilité sociétale, elles contribuent à la création de valeur et de l’emploi et donc à l’inclusion sociale et à la protection de tous.
En effet, dans le cadre du Nouveau Modèle de Développement (NMD) du Maroc, le secteur privé occupe une place centrale en tant que moteur de croissance économique et acteur clé de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Le nouveau pacte national pour le développement met en avant le rôle des entreprises dans la création de valeur, la génération d’emplois et la promotion d’une société dynamique et responsable. L’économiste Mohamed Jadri insiste sur le rôle des entreprises pour accompagner les mesures gouvernementales à caractère social. Avis partagé par l’experte en RSE, Radia Cheikh Lahlou qui estime que les entreprises doivent s’engager dans les chantiers sociaux du Royaume. «Elles ont un rôle crucial à jouer sur ce volet en contribuant à la création de valeur sociale », insiste t-elle.

Une responsabilité étendue
Pour la première fois, en avril 2020, toutes les entreprises du Maroc faisant publiquement appel à l’épargne ont dû publier un rapport RSE pour respecter les directives de l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC) conformément à la circulaire n° 03/19 du 20 février 2019 relative aux opérations et informations financières publié aux B.O numéro 6784 du juin 2019. Pour certaines, l’exercice n’était pas nouveau et la démarche RSE était bien intégrée. Pour d’autres, en revanche, la question a été nouvelle. Radia Cheikh Lahlou insiste que la RSE s’impose à toute entreprise au vu des bénéfices et avantages qu’elle apporte. « En prenant en compte les enjeux sociaux et environnementaux, les entreprises renforcent leur image de marque, améliorent leur réputation et gagnent en attractivité auprès des consommateurs et des talents. De plus, en contribuant activement au développement durable, elles créent de la valeur économique et participent à l’inclusion sociale en favorisant l’emploi et en soutenant les communautés locales », détaille l’experte RSE. Pour elle, il est essentiel que les entreprises prennent d’abord en compte les enjeux sociaux, tels que les conditions de travail des collaborateurs, la gestion de leur carrière, ainsi que la santé et la sécurité au travail. De plus, elles doivent participer à la création de valeur sociale en recrutant localement pour réduire les inégalités. L’engagement communautaire ne doit pas se limiter à une approche superficielle, mais plutôt à la formation des jeunes au sein de la région et au soutien des coopératives. Les entreprises disposent d’un savoir-faire inestimable qu’elles peuvent partager pour favoriser le développement des communautés locales.
Des opportunités inexploitées
D’après Radia Lahlou, les entreprises ont un champ d’opportunités encore peu exploité pour créer une valeur sociale. Il existe des innovations sociales et des initiatives porteuses d’impact environnemental et sociétal. Elle cite ici l’exemple de la société des eaux minérales d’Oulmès, qui, face à l’enjeu de stress hydrique, a lancé une compétition au sein de l’organisation Enactus, réunissant 6000 jeunes, afin de trouver des solutions innovantes liées à l’eau. Cette initiative, ajoute-elle, permet non seulement de transmettre des connaissances aux jeunes, mais aussi de les sensibiliser aux enjeux environnementaux et d’accroître l’emploi auprès de cette catégorie. Les avis des experts sont unanimes : l’État ne peut pas résoudre tous les problèmes, il est donc crucial que les entreprises s’engagent davantage et accroissent leur responsabilité sociale. Des solutions existent aujourd’hui, mais elles ne sont pas encore suffisamment exploitées par le tissu économique.

Encadré: financer la TPE et encourager l’entrepreuneuriat

Compte tenu des difficultés d’accès des jeunes aux sources de financement et des contraintes que subissent les Toutes petites entreprises et eu égard aux effets de la crise de la Covid-19 sur l’économie nationale, la promotion de l’entrepreneuriat et la création de l’emploi sont inscrites parmi les priorités du programme gouvernemental. Dans ce contexte, le gouvernement avait lancé le programme Forsa, un programme ambitieux et novateur qui s’adresse à toutes les personnes âgées de plus de 18 ans porteuses d’idées ou de projets d’entrepreneuriat. En réponse aux Hautes orientations royales pour la promotion de l’investissement et de l’emploi, particulièrement parmi les jeunes, le programme Forsa met l’autonomisation des citoyens au cœur de son action et prévoit ainsi deux dispositifs combinant accompagnement et financement. Le dispositif d’accompagnement comprend une formation en e-learning pour l’ensemble des projets retenus, ainsi qu’une incubation de 2,5 mois au profit des projets les plus prometteurs, à travers la mobilisation d’incubateurs régionaux. Pour sa part, le dispositif de financement prévu au profit des bénéficiaires consiste en un prêt d’honneur d’un montant maximal de 100.000 dirhams, dont une subvention pouvant atteindre 10.000 dirhams. Tous les secteurs d’activité sont éligibles, et la durée maximale du remboursement du prêt est de 10 ans avec un différé de 2 ans. En 2022, sur les 168 000 candidatures soumises via la plateforme numérique du programme «Forsa», 10.000 porteurs de projets ont été accompagnés. Dans le cadre de la loi de Finances 2023, le gouvernement a alloué 1,25 milliard de dirhams à ce programme «Forsa», sous forme de prêts d’honneur d’une valeur de 10 millions de centimes, dont un million de centimes en tant que subvention.

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