La CNSS en action : Vers une couverture médicale pour tous
Face l’expansion rapide de sa base d'assurés, la CNSS doit faire face à des défis considérables. Cet article détaille les différentes actions entreprises par l’organisme pour réussir ce chantier historique de la généralisation de l’assurance maladie.

La généralisation de l’AMO au Maroc constitue un progrès significatif vers l’instauration d’une couverture médicale universelle. Le processus s’est déroulé en deux étapes. La première consistait en l’intégration des Travailleurs Non-Salariés (TNS), tandis que la seconde a permis le basculement des bénéficiaires du RAMED vers l’AMO. L’opération d’immatriculation des TNS a connu une accélération depuis le 1er décembre 2021, et à ce jour, toutes les catégories de TNS sont désormais couvertes. La CNSS a immatriculé près de 2,3 millions de TNS, dont 1 million d’agriculteurs, 460 000 artisans, 320 000 auto-entrepreneurs et plus de 250 000 artisans et commerçants assujettis à la contribution professionnelle unique. Le nombre total de bénéficiaires atteint 6,7 millions, en incluant les TNS et leurs ayants droit. Le 1er décembre 2022 marque par ailleurs, une étape historique pour la protection sociale au Maroc avec l’entrée en vigueur du régime d’Assurance Maladie Obligatoire (AMO) pour les personnes incapables de s’acquitter des cotisations, tel que défini par la loi 65-00. Cette mesure a permis d’étendre la couverture médicale à l’ensemble des Marocains, ouvrant ainsi la voie vers la généralisation de la protection sociale. Cette étape a entraîné l’immatriculation automatique de plus de 10 millions de personnes, soit environ 3,6 millions de familles, à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS). Les bénéficiaires du régime d’assistance médicale RAMED ont été transférés automatiquement vers le régime d’AMO. Dans le cadre de cette mesure, l’État prend en charge les cotisations de cette population tant qu’ils sont dans l’incapacité de s’en acquitter. Ainsi, ces assurés et leurs ayants droit continueront de bénéficier gratuitement des prestations médicales fournies par les établissements publics de santé, à condition de ne pas être déjà bénéficiaires d’un autre régime d’assurance maladie obligatoire. Selon la CNSS, Ce processus s’est déroulé sans encombre grâce à la mise en place d’un basculement automatique à partir des fichiers fournis par l’Agence Nationale de l’Assurance Maladie (ANAM).
Défi opérationnel
L’arrivée massive de nouveaux assurés, notamment les Travailleurs Non-Salariés et les assurés de l’AMO Tadamon, a entraîné une augmentation significative du nombre de personnes immatriculées à la CNSS, passant de 7,8 millions à 23,2 millions. Cela a posé des défis opérationnels majeurs, car les systèmes d’information existants n’étaient pas adaptés à la population non-salariée. La CNSS a dû adapter ses processus, renforcer ses équipes et améliorer ses capacités de traitement et de liquidation des dossiers AMO. Depuis le lancement de l’AMO, la CNSS note que durant le premier trimestre de l’année en cours, elle a reçu 430.000 dossiers de remboursement de frais de soins, représentant un montant de 380 millions de dirhams. En outre, 38 000 prises en charge ont été enregistrées, pour un montant de 580 millions de dirhams. Ces chiffres ne prennent pas en compte les dossiers provenant des hôpitaux publics, où le processus est fluide grâce au tiers payant mis en place. À ce jour, environ 140 000 dossiers ont été reçus des hôpitaux publics, et il est estimé qu’il y en a au moins un million au total. Le nombre de dossiers de remboursement déposés quotidiennement à la CNSS a considérablement augmenté, passant de 22 000 en décembre 2020 à 60.600 en avril dernier.
Digitalisation du processus
La digitalisation joue un rôle clé dans le bon fonctionnement du système de l’AMO. La CNSS a collaboré avec les hôpitaux publics pour mettre en place une interopérabilité entre les systèmes d’information, permettant ainsi une prise en charge immédiate des assurés lorsqu’ils se présentent à l’hôpital. Une première phase a été franchie avec succès grâce à la mise place d’un nouveau système d’information ouvert et doté d’un module de feuille de soin électronique. Le déploiement progressif auprès des prestataires de soins est prévu dans les 9 à 12 prochains mois. Et présente des avantages significatifs tels que la réduction des coûts, l’amélioration des délais de traitement et la collecte de données pour lutter contre la fraude et améliorer les analyses épidémiologiques et préventives.
Gestion de l’afflux des dossiers
La montée en charge conséquente de l’activité de la CNSS a également nécessité une adaptation du réseau de proximité. En plus d’étendre le réseau des agences de 120 à 170, la CNSS a établi un partenariat avec les pharmacies pour faciliter l’accès aux médicaments pour les assurés. Ce partenariat permet aux assurés de bénéficier d’un réseau de pharmacies conventionnées où ils peuvent retirer leurs médicaments sans avancer les frais. En outre, la CNSS a augmenté sa capacité de traitement des dossiers en renforçant son personnel et en mettant en place un centre d’opération back-office externes. Malgré ces avancées, plusieurs contraintes ont été identifiées. Tout d’abord, la coordination entre les différents acteurs du système de santé reste un défi à relever notamment en termes d’échanges d’informations et de données. Il est essentiel d’améliorer la communication entre la CNSS, l’ANAM, les hôpitaux publics et les pharmacies pour assurer une prise en charge optimale des assurés.
Encadré: Formation et renforcement des compétences
Pour la CNSS, la formation des professionnels de santé sur les procédures de l’AMO est nécessaire pour éviter les erreurs de facturation et faciliter le processus de remboursement. Face aux défis posés par la généralisation de la couverture médicale obligatoire, la CNSS a mis en place des programmes de formation et de renforcement des compétences de son personnel. Des sessions de formation sont organisées pour les employés afin de les familiariser avec les nouveaux processus et systèmes, et de garantir la qualité des services fournis aux assurés.
Enfin, la lutte contre la fraude et les abus reste un enjeu majeur. La CNSS met en place des mesures de contrôle et de vérification pour détecter les cas de fraude et garantir la bonne utilisation des fonds de l’AMO. « Il est nécessaire de renforcer ces dispositifs de contrôle pour assurer la durabilité du régime d’assistance médicale et préserver les ressources destinées aux plus démunis », commente la CNSS.